«Dans deux ans, j'arrêterai. Je ferai autre chose. Ce sera une nouvelle forme d'expression» Crédits photo : Le Figaro
Le pape de la création d'objets juge son œuvre «absurde».
Franchement, à quoi sert le design ? Posée par un quidam, la question ferait pousser des cris d'orfraies aux amateurs d'harmonie fonctionnelle et de lignes pures. Mais que rétorquer quand le pape de la discipline insinue le doute ? Car c'est Philippe Starck, en personne, qui déclare, cette semaine, dans un supplément de l'hebdomadaire allemand Die Zeit que « d'un point de vue structurel, le design est totalement inutile » . Il va sans dire que le travail de cette star internationale du bel objet ne pèse pas non plus lourd dans la balance. « J'ai essayé de donner à mes produits un peu de sens et d'énergie. Mais même quand j'ai donné le meilleur de moi-même, c'était absurde » , admet-il.
Ce n'est pas la première fois que l'homme s'interroge sur le sens de toute sa vie. On peut dénicher sur Internet, sur le site de partage de vidéos YouTube, son inoubliable prestation lors d'un cycle de conférences en 2007 en Californie.
Dans un anglais qu'aucun francophone n'aura de mal à comprendre, le facétieux designer se demandait ce qu'il pouvait bien faire sur cette scène où se succédaient les beaux esprits de la planète, lui, le créateur de presse-citron, de sièges de toilettes et de brosses à dents. Un véritable show où Starck revisitait l'histoire de l'humanité pour finir sur cette note grave : si le designer est « acceptable » en des temps civilisés, « quand la barbarie est de retour, oubliez les belles chaises, les beaux hôtels. Il y a des priorités ». Et il ajoutait : « Voilà pourquoi j'ai si honte de faire ce métier. »
Aujourd'hui, Philippe Starck continuerait donc de battre sa coulpe et avoue : « J'ai créé tellement de choses sans vraiment m'y intéresser. » « Peut-être toutes ces années ont-elles été nécessaires pour que je me rende compte finalement qu'au fond, nous n'avons besoin de rien ? Nous possédons toujours trop. »
De là à se sentir lui-même de trop, il n'y a qu'un pas. Alors Starck annonce « dans deux ans, j'arrêterai, c'est sûr. Je ferai autre chose, je ne sais pas encore quoi. Ce sera une nouvelle forme d'expression. Une nouvelle arme, plus rapide, plus violente et plus légère que le design ». Peut-être devrait-il penser à la scène. Après tout, il n'y est pas mauvais.
vendredi 1 août 2008
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